Spécial ingérdients : les protéines

• Qu’elles soient d’origine animale ou végétale, les protéines offrent de nombreuses fonctionnalités texturantes, gélifiantes et émulsifiantes

• Le marché est en croissance et les fournisseurs ne cessent d’innover pour explorer de nouvelles fonctionnalités et applications

• Les protéines végétales connaissent un regain d’intérêt, en lien avec les préoccupations de développement durable

• Les consommateurs sont à la recherche de produits enrichis en protéines, mais aussi d’alternatives à la viande : les protéines végétales ont fait d’énormes avancées pour proposer des produits mixtes voire 100% végétaux offrant des qualités gustatives équivalentes

 

Ingrédients fonctionnels : Incontournables protéines !

 

Grâce à leurs acides aminés, les protéines sont essentielles à la croissance humaine. Elles offrent également toute une gamme de propriétés structurelles et fonctionnelles avec un impact profond sur la qualité des aliments. En industrie agroalimentaire, les protéines sont donc un ingrédient majeur et la maitrise des ingrédients protéiques est à la base de l’excellence en art culinaire. Ilias MARMOUZI

 

protéine« Les aliments et les boissons riches en protéines sont recherchés par les consommateurs, ce qui explique pourquoi de nombreuses entreprises positionnent leurs produits sur ce segment pour répondre à la demande », indique Dr Andrea Maurer, Global Lead Market Segment Dairy chez ICL Food Specialities. Dr Thomas Croguennec, Professeur au département d’agroalimentaire d’Agrocampus Ouest, France, ajoute : « les protéines sont des ingrédients multifonctionnels utilisés dans les produits alimentaires pour leurs rôles nutritionnels et texturants. » Le terme protéine est défini comme tout groupe de composés organiques complexes, constitué essentiellement de combinaisons d’acides aminés avec des liaisons peptidiques, qui contiennent du carbone, de l’hydrogène, de l’oxygène, de l’azote et habituellement du soufre. « Une propriété nutritionnelle commune à l’ensemble des protéines est liée à leurs éléments constitutifs, les acides aminés, dont certains ne peuvent être synthétisés par l’homme et doivent donc être apportés par l’alimentation ; ils sont dits indispensables », rapporte Dr Croguennec.

 

Les sources de protéines en agroalimentaire

Les sources majeures procurant les protéines alimentaires sont les végétaux et les animaux. Les protéines animales proviennent essentiellement du lait, de l’oeuf, des poissons et de la viande, alors que les protéines végétales proviennent en grande partie des céréales et des légumineuses. Ces protéines peuvent être naturellement présentes dans les aliments ou être rajoutées pour des raisons nutritionnelles ou techno-fonctionnelles. Le lait est l’une des sources indispensables de protéines. Il existe deux principaux types de protéines dans le lait, qui peuvent être séparées en fonction de leur solubilité. Les protéines qui précipitent à un pH acide (caséines) et celles qui restent solubles (sérum ou lactosérum). La viande est également une source importante de protéines alimentaires. Les protéines musculaires contribuent grandement aux propriétés globales de la viande, y compris la texture, la qualité sensorielle, ainsi que la stabilité physique pendant le stockage.

 

À part quelques exceptions, les plantes riches en huile végétale ne sont généralement pas considérées comme des sources principales de protéines pour la consommation humaine. Pourtant, beaucoup parmi elles contiennent un niveau appréciable de protéines. Parmi ces plantes, citons le soja, le canola (colza), le tournesol, le carthame, l’arachide, le maïs, le coton, le sésame, le lin et même le chanvre. Ainsi, la protéine de soja est une protéine complète de qualité, fournissant tous les acides aminés essentiels, déclare Dr Garry Mendelson, du service Nutrition chez DuPont Nutrition and Health. Pour répondre aux besoins de la nutrition humaine et animale, les fournisseurs travaillent sur des protéines extraites de sources extrêmement variés. Ainsi le groupe Roquette propose une large gamme de protéines végétales à partir de sources végétales (pois, blé, maïs, pomme de terre). De son côté, Improve (Institut Mutualisé pour les Protéines végétales, plateforme européenne ouverte dédiée à la valorisation des protéines du futur, fruit d’un partenariat public/ privé français) extrait ses protéines « des racines, des feuilles et des algues. Mais, on parle de plus en plus de protéines du futur, c’est-à-dire toutes les protéines alternatives aux protéines classiques du monde animal (protéines laitières, protéines d’oeufs, gélatine, etc.). En plus des sources  citées, on trouve maintenant les protéines de la mer, des insectes et de microorganismes », indique son Directeur Général Denis Chereau. Généralement, les algues marines sont rarement promues pour la valeur nutritionnelle de leurs protéines. « Pourtant, certaines algues rouges peuvent avoir des teneurs en protéines plus élevées que celles enregistrées à partir de légumineuses telles que le soja. D’autres algues comme Ulva, Undaria ou Entormorpha ont des niveaux de protéines comparables à ceux rapportés pour les légumes communs », indique le Professeur Fleurence de l’Université de Nantes.

 

Une question de texture

protéine« L’art culinaire combine les produits selon leurs propriétés fonctionnelles. Les protéines sont utilisées pour leur pouvoir émulsifiant, gélifiant, viscosifiant, collant, etc. », relate Denis Chereau. Plusieurs facteurs peuvent influencer les fonctionnalités d’une protéine. Il s’agit de facteurs intrinsèques et extrinsèques (pH et température) ou environnementaux (sels, tensioactifs, gommes, eau, etc.), en plus des traitements et du process. Les facteurs intrinsèques ou les caractéristiques physicochimiques qui rendent une protéine utile en agroalimentaire sont appelés propriétés fonctionnelles.

Les fonctionnalités des protéines sont souvent classées en trois catégories :

  • 1- Les interactions protéine-eau : faculté de réhydratation et de solubilité de la protéine, impact sur la viscosité et capacité de rétention d’eau ;
  • 2- Les interactions protéines-protéines : capacité à créer un gel, une texture ;
  • 3- La propriété de surface : fonctionnalité d’émulsification pour l’interaction protéine-matière grasse ou de foisonnement pour l’interaction protéine-gaz.

 

L’élaboration de la texture est en partie liée à la formation d’un gel, c’est-à-dire à la création d’un réseau de protéines qui se lient entre elles. « Ainsi, selon la concentration protéique, un gel peut être formé. Les propriétés des gels (élasticité, cassant, fondant, etc.) dépendent de la nature des protéines et de leurs concentrations, des conditions physicochimiques (pH, barème thermique, etc.) mises en oeuvre pour provoquer l’interaction des protéines entre elles ainsi que de la présence d’entités moléculaires ou supramoléculaires pouvant interférer dans l’établissement de ces interactions », indique Dr Croguennec. Selon la nature de la protéine, le caractère du gel sera très varié (maillage du réseau et type de liaisons entre les protéines). « Les caséines micellaires sont sensibles au pH et aux enzymes : elles forment un gel à pH acide alors que les protéines solubles sont sensibles à la chaleur. Les procédés alimentaires utilisent ces différents éléments pour optimiser les fonctionnalités des protéines du lait et obtenir la texture recherchée », explique-t-on chez Ingredia.

 

Les protéines possèdent aussi des propriétés amphiphiles. Dr Croguennec nous explique leur intérêt : « les protéines possèdent une aptitude à s’adsorber aux interfaces (propriété tensioactive) et contribuent ainsi à la formation des émulsions ou des mousses qui sont le plus souvent des dispersions de gouttelettes d’huile ou de gaz dans une phase continue aqueuse. Une fois adsorbée, les protéines forment un film suffisamment viscoélastique à la surface des gouttelettes d’huile et des bulles d’air pour assurer la stabilité de la dispersion pendant sa durée de vie. » Et d’ajouter : « dans le contexte précis des émulsions, les protéines sont reconnues pour être de moins bons agents tensioactifs que les petits émulsifiants tels que la lécithine, les mono et diglycérides ainsi que leurs dérivés. En ce sens, les protéines vont créer des émulsions plus grossières. Elles permettent malgré tout d’obtenir des émulsions dont les gouttelettes lipidiques ont un diamètre de quelques dixièmes de micromètre, ce qui est suffisant pour prévenir leur crémage, même dans les produits à faible viscosité. » Les protéines étant sensibles aux facteurs extrinsèques, on peut s’attendre à ce que leurs propriétés soient altérées par des opérations de transformation alimentaire telles que le traitement thermique ou à haute pression, la congélation et le stockage congelé, la déshydratation, la concentration, le mélange, l’homogénéisation, l’extrusion et les procédés membranaires tels que l’ultrafiltration.

 

Propriétés techno-fonctionnelles des protéines

Fonction Mécanisme Aliments
Solubilité Hydrophilie Boissons
Viscosité Liaison à l’eau et taille hydrodynamique Soupes, sauces, vinaigrette
Liaison à l’eau Liaison hydrogène Viande / saucisses, gâteaux, pains
Gélation Formation de réseau Viandes, saucisses, pâtes, produits de boulangerie
 Elasticité Interactions hydrophobes, réticulations disulfure Produits de viande, produits de boulangerie
 Emulsification Adsorption interfaciale, formation de film Saucisses, soupes, vinaigrette, desserts
Moussage Adsorption interfaciale, formation de film  Garniture fouettées, gâteaux, mousse, nougat
 Liaison au gras et aux saveurs Liaison hydrophobe Produits de boulangerie

 

Ainsi, « certaines protéines possèdent une activité biologique qui est souvent associée à un état structural donné. Cette activité sera perdue ou atténuée lorsque la structure de la protéine va être modifiée, par exemple lors d’un traitement thermique », relève Dr Croguennec. Ces changements ne sont pas nécessairement indésirables et le traitement peut être contrôlé pour modifier intentionnellement la structure et la fonctionnalité des protéines alimentaires. Par exemple, en-dessous d’une concentration critique de gélification, la dénaturation thermique des protéines conduit à la formation d’agrégats de taille finie. « Cette caractéristique est mise à profit pour élaborer des agrégats protéiques dont le diamètre est proche de celui des gouttelettes lipidiques rencontrées dans les aliments et ainsi emprunter une partie de leurs propriétés dans les produits allégés en matière grasse. Au-delà d’une certaine taille, les agrégats protéiques confèrent un caractère granuleux à l’aliment », précise Dr Croguennec. « Les protéines forment une barrière protectrice suffisamment épaisse à la surface des gouttelettes lipidiques pour retarder leur coalescence », poursuit-il. Cette barrière est responsable de la stabilité des globules gras du lait entier homogénéisé tout au long de sa durée de conservation. « A l’inverse, cette barrière constitue un frein pour la formation d’une crème glacée onctueuse avec de bonne propriété de résistance à la fonte car, dans ce contexte particulier, une déstabilisation partielle des globules gras est requise », ajoute Dr Croguennec. Le rôle des protéines dans la création d’une grande variété de textures est d’une importance particulière car toutes les propriétés fonctionnelles des protéines musculaires ne peuvent pas être reproduites par d’autres protéines alimentaires ou des ingrédients fonctionnels non protéiques. Certains analogues de viande, élaborés à partir de protéines végétales, ne parviennent pas toujours à reproduire la texture et la sensation en bouche de la viande. « Par conséquent, la préparation de protéines fonctionnelles à partir de sources musculaires est une nécessité dans le développement d’aliments musculaires de qualité auxquels les consommateurs sont si habitués », juge Professeur Y.L. Xiong de l’université de Kentucky aux États-Unis, dans le livre « Proteins in Food Processing ».

 

Multiples applications

protéineLes protéines sont utilisées comme ingrédients dans de très nombreux produits alimentaires parce qu’elles contribuent à une ou plusieurs des caractéristiques souhaitées de ce produit. « Il peut y avoir des applications dans le monde de la panification, des biscuits, des produits à base de viande, de la crème glacées et une centaine d’autres applications en agroalimentaire », estime Denis Chereau. Par exemple, les protéines totales de lait « sont particulièrement utilisées en fromagerie traditionnelle, où elles améliorent les qualités fromagères du lait. Elles sont également appréciées des industriels du yaourt (yaourts brassés ou yaourts à boire) pour leurs capacités à renforcer la texture et la viscosité de ces produits frais. Par ailleurs, les protéines totales permettent d’enrichir les boissons et les solutions nutritionnelles, en protéines, tout en conservant un très bon goût laitier », indique l’équipe marketing d’Ingredia, qui commercialise aussi des caséines pour la fromagerie traditionnelle, en technologie sans séparation de sérum ou en procédé de fonte (amélioration de texture, rétention d’eau, augmentation des rendements fromagers), ainsi que pour les produits laitiers frais à hautes teneurs en protéines. Ingredia indique que « elles permettent en outre d’enrichir les boissons nutritionnelles jusqu’à 14% de protéine, tout en conservant une très bonne fluidité, et de développer des crèmes desserts avec une texture onctueuse et crémeuse jusqu’à 12% de protéine. » Les protéines de lactosérum sont généralement valorisées en nutrition sportive pour leurs bénéfices sur la synthèse musculaire. Chez Comaner, distributeur d’Ingredia au Maroc, la caséine présure est proposée pour les applications fromages fondus et pizza cheese grâce à ses propriétés émulsifiantes. « Du fait de sa granulométrie très fine, elle s’hydrate vite et convient à l’utilisation des cuiseurs rapides », précise Hanen Bouslimi, Ingénieur Commercial de Comaner. La caséine acide, quant à elle, convient aux fromages fondus en portion et à tartiner. « Les caséines sont des protéines de lait de haute qualité, utilisées comme agent émulsifiant et épaississant dans les fromages fondu, pizza cheese, soupes, sauces, produits laitiers. Enfin, le concentré protéique de lait est exploité pour enrichir et standardiser la fraction protéique de la matière première dans la fabrication des produits laitiers », poursuit Mme Bouslimi. Le groupe ICL Food Specialties propose aussi une large gamme de solutions à base de lait, de lactosérum et de protéines végétales. Parmi ces produits, un isolat de protéines de lactosérum permet de formuler des boissons claires à haute teneur en protéines. « C’est un candidat idéal pour des applications difficiles comme les boissons énergisantes ou la bière non alcoolisée », indique Dr Andrea Maurer. Et d’ajouter : « enrichir des boissons transparentes sans modifier le goût, la texture ou l’apparence tend à être plus difficile que de faire de même pour les boissons à base de lait. »

 

A l’inverse de certaines protéines végétales, le pois ne fait pas partie des 14 allergènes majeurs et peut donc être utilisé librement par les industriels. « Les protéines de pois sont utilisées pour leur propriété émulsifiante », relate Patrice Bassot, Président du GEPV (Groupe d’Etude et de Promotion des Protéines Végétales). Marie Blondel, Responsable Communications Marketing Europe chez Roquette, souligne que « ses faibles viscosité et solubilité confèrent à la protéine de pois les propriétés idéales pour la formulation de biscuits à la fois riches en protéines et à la texture croustillante et croquante. » Les protéines de pois texturées permettent aussi « d’obtenir des textures particulièrement intéressantes, semblables au burger (tendre et juteuse et au goût préservé) », explique Anne-Sophie Vercruysse, Market Manager Europe chez Roquette. Toujours dans la gamme des protéines de pois, Roquette propose des protéines adaptées aux applications boissons grâce à leur grande solubilité et à leur fine granulométrie. « Sur le marché des boissons et produits fermentés végétaux à base d’amande ou de riz, souvent pauvres en protéines, la protéine de pois Nutralys® S85F permet de compléter l’apport en protéines tout en gardant le bon goût recherché par le consommateur. », poursuit Mme Vercruysse. Outre les protéines du pois, la protéine de blé (gluten) offre plusieurs applications. « Dans les produits de panification, on l’utilise pour augmenter la teneur en protéines de la farine, et ainsi la renforcer et améliorer le réseau de gluten de la pâte », explique Patrice Bassot. Le gluten est utilisé dans les substituts de viande, en tant que source de protéines. Ses propriétés d’épaississant permettent de créer un réseau de gluten et ainsi faire ralentir les mouvements d’eau dans le produit. Selon Patrice Bassot, « cela permet d’apporter tenue et régularité au produit. » Enfin, le gluten peut être hydrolysé et utilisé ainsi « pour sa teneur en protéines, pour assouplir les pâtes en panification (ce type de gluten va venir gêner la formation du réseau et ainsi apporter de l’extensibilité à la pâte) », continue Patrice Bassot. Enfin, texturé, le gluten présente un goût et une couleur neutres et peut absorber jusqu’à 4 fois son poids en eau. Les propriétés de la protéine de lupin sont aussi très utiles pour la panification « une fois atomisée (technique permettant d’évaporer l’eau d’un produit), la protéine de lupin est dotée d’une très bonne capacité émulsifiante, d’une bonne solubilité et enfind’un goût neutre », ajoute Patrice Bassot.

 

protéineLes protéines de soja possèdent de nombreuses applications. Outre le traditionnel tofu, émulsion de lait de soja et de protéines de soja, les protéines de soja sont plébiscitées dans l’industrie des produits carnés et de la mer. « Grâce à leur propriété liante, les protéines de soja apportent de la texture au produit fini. De plus, elles permettent aux fabricants d’améliorer le profil nutritionnel du produit en remplaçant une partie de la matière animale par des protéines végétales, ainsi la teneur en matières grasses du produit fini diminue. Elles peuvent aussi être utilisées dans les produits pour végétariens, dans la nutrition infantile ou encore dans certaines boissons », indique Patrice Bassot. Chez ADM, qui propose une famille d’ingrédients fonctionnels à base de soja (concentrés de protéines de soja et concentrés texturés), Alan Bruce, Directeur commercial international, viandes et repas, confirme que « les protéines de soja fonctionnelles conviennent à de nombreuses applications carnées, notamment les produits de viande hachés, émulsifiés ou reconstitués. » ADM propose également des protéines sous forme de flocons, qui permettent aux fabricants de barres protéinées ou autres produits similaires d’augmenter l’apport en protéines de façon pratique. « C’est un moyen économique pour élargir le profil nutritionnel d’un produit tout en autorisant des textures, des formes et des profils gustatifs variés », renchérit Alan Bruce.

 

Enfin, une des applications les plus intéressantes et innovantes pour les protéines végétales est la production d’analogues de viande, à l’image du procédé innovant de la société Tereos, qui permet d’obtenir un produit fini ayant l’apparence de viande de poulet (cf. article suivant).

 

Un marché en pleine évolution

Connaissant actuellement une croissance forte, le marché des protéines est amené à se développer encore davantage dans les années à venir. Une tendance favorable aux protéines animales, mais aussi aux protéines végétales, qui se positionnent de plus en plus comme un complément voire une alternative crédible, permettant de satisfaire aux exigences du développement durable et à la nécessité de diminuer la consommation de viande pour des questions éthiques et/ou de santé. Maria MOUHSINE

 

La demande mondiale de viande devrait s’accroitre d’environ 30% à l’horizon 2030, précise Jack Guéguen, Directeur de recherche, Chargé de Mission INRA (dans Guéguen J, et al. Les protéines végétales : contexte et potentiels en alimentation humaine. Cahiers de nutrition et de diététique (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j. cnd.2016.02.001). Ainsi, « en 50 ans, la consommation de viande dans le monde a été multipliée par 4 pour atteindre 320 millions de tonnes : la consommation de volailles a même été multipliée par 8, celle de porcs par 3 à 4 et celles de ruminants (bovins et ovins) par 2 », explique Jean-Paul Simier, Directeur Agriculture et agroalimentaire de Bretagne Développement Innovation (BDI). Pour satisfaire les besoins grandissants du monde de l’élevage, le secteur des aliments du bétail ira en se développant, favorisant ainsi la croissance en volume du marché des protéines.

 

 

Croissance régulière

Le marché des protéines végétales destinées à l’alimentation humaine devrait connaitre quant à lui une croissance annuelle de 5% entre 2008 et 2018, précise le même article. En alimentation humaine, « la demande des protéines végétales est principalement tirée par la volonté des consommateurs de prendre soin de leur santé et de la préoccupation de ceux-ci en termes de développement durable », souligne Anne-Sophie Vercruysse, Market Manager Europe, Roquette. D’autres raisons justifient cette tendance, notamment pour diminuer le coût des aliments ou encore exploiter des propriétés fonctionnelles ou nutritionnelles particulières. Ainsi, dans plusieurs pays, les consommateurs décident de manger moins de viande, sans pour autant devenir complètement végétariens. Ce mode de consommation « flexitarien » présente, d’après Anne Lacoste, Responsable de la R&D chez Cooperl, plusieurs opportunités dans le développement des protéines alternatives ou encore des protéines de substitution. Une étude réalisée par le GEPV (Groupe d’Étude et de Promotion des Protéines Végétales), dont l’objectif est d’analyser le marché des produits commercialisés dans les magasins français (bilan de référencement), vient confirmer cette tendance. En effet, explique Patrice Bassot, Président du GEPV, « cette étude a permis de constater une très nette augmentation des produits contenants des matières protéiques végétales (MVP). Le nombre de références a presque été multiplié par 5 entre 2009 et 2015 ! Les trois secteurs où l’on retrouve le plus de présence des MVP sont la BVP, les viandes et les produits traiteurs (80%). Pour les protéines, c’est principalement le gluten qui est utilisé (65%), devant le soja (17%). » D’ailleurs, souligne Alan Bruce, Directeur commercial international, viandes et repas chez ADM, « le terme « protéine » et en particulier « protéine d’origine végétale » est actuellement le terme à la mode sur le marché. »

 

Pour Denis Chereau, Directeur Général d’Improve, réduire les protéines animales au profit des protéines végétales, est devenu une nécessité : « aujourd’hui, le monde occidental consomme 65% de ses protéines du monde animal. Ce modèle n’est pas durable si on l’étend sur la totalité des humains. Il y a donc une nécessité absolue de privilégier les protéines végétales dans l’alimentation humaine pour un meilleur partage des ressources. » Outre la question de la durabilité, la croissance démographique mondiale et la pression sur la demande en protéines qui ne cesse d’augmenter rendent donc « nécessaire de trouver de nouvelles alternatives et de nouvelles sources de protéines, comme les protéines végétales », expliquet- on auprès d’Ingredia. « Cependant ces protéines ne peuvent pas substituer à 100% les protéines de lait, sur différents points : qualité organoleptique, solubilité, déficience en certains acides aminés essentiels… », précise l’équipe marketing d’Ingredia. Quant aux sources alternatives de protéines (algues, insectes, bactéries, levures…), « on constate leur arrivée sur le marché mondial, mais ce n’est pas encore le cas sur le marché marocain », précise Hanen Bouslimi, Ingénieur Commercial de Comaner.

 

Les protéines végétales, une alternative aux protéines animales ?

protéinesAfin d’accompagner cette nouvelle croissance, plusieurs entreprises ont cherché à adapter leur offre à la demande du marché. Ainsi, pour subvenir aux besoins nutritionnels en acides aminés fournis par les protéines animales et qui sont indispensables à l’alimentation humaine, des entreprises comme ADM, Improve et DuPont Nutrition and Health, mettent en avant les protéines de soja, qui sont très nutritives. « En plus de leurs nombreux bienfaits pour la santé, elles constituent également une alternative plus écologique et durable aux protéines d’origine animale. Ainsi, avec la popularité grandissante des régimes végétariens et végétaliens, le marché des produits non carnés croît aussi rapidement et le soja a tendance à s’imposer comme l’une des principales sources alternatives de protéines », confirme Alan Bruce, Directeur commercial international, viandes et repas, chez ADM. De son côté, Dr Garry Mendelson, du Service Nutrition de DuPont Nutrition and Health, explique : « d’un point de vue nutritif, notre isolat de protéine de soja est comparable aux protéines animales de qualité élevée, comme le petit-lait, la caséine et les oeufs. Elle peut les remplacer dans divers aliments sans sacrifier les teneurs protéiques apportées, car elle contient tous les acides aminés essentiels dans les proportions appropriées ; cela leur permet d’être utilisées de façon optimale dans le métabolisme protéique humain. »

 

Ainsi, plusieurs possibilités d’utilisation des protéines végétales ont été mises en évidence, comme nous explique Denis Chereau : « un exemple intéressant est la fabrication de produits avec une apparence de viande. La société Tereos a ainsi développé un procédé, primé au concours mondial de l’innovation, qui combine des protéines de céréales avec des protéines de légumineuse pour donner un produit fini ayant l’apparence de viande de poulet. » Après une phase de recherche et développement, Tereos démarre cette année une unité de production pilote, permettant d’amorcer une première commercialisation sur le marché de la restauration collective. Présenté sous le nom de « GenVie » durant sa phase de conception, ce nouveau produit prendra le nom de « Sauté Végétal » pour sa commercialisation en restauration collective. Confectionné sous forme d’émincés, « Le Sauté Végétal » se distingue par sa composition 100% végétale à base de protéines de blé et de farine de pois chiche, l’ensemble issu de matières premières agricoles françaises. Un produit qui offre les mêmes qualités nutritionnelles et des propriétés organoleptiques comparables tout en étant entièrement végétal !

 

protéine

En outre, de par leur grande digestibilité chez les nourrissons, les protéines d’origine végétale sont de plus en plus populaires dans le domaine de l’alimentation infantile, en particulier « chez les bébés intolérants au lactose, pour lesquels les formules infantiles à base de soja sont plus digestes », corrobore Alan Bruce. Et aujourd’hui, les boissons au soja deviennent de plus en plus populaires dans les cafés et les restaurants, et sont servies souvent en remplacement du lait, reprend M. Bruce.

 

 

 

 

 

Un équilibre à trouver

protéinesNéanmoins, d’après le GEPV, le Plan National Nutrition Santé estime qu’il faut équilibrer l’apport en protéines, car les protéines d’origine végétale sont moins concentrées en acides aminés et ont une valeur calorique inférieure aux sources animales. En effet, « la biodisponibilité, c’est-à-dire la proportion d’acides aminés qui, après digestion et absorption, devient disponible pour le métabolisme, est globalement plus faible dans les sources végétales, avec des compositions d’acides aminés individuelles parfois moins équilibrées », confirme Marie Blondel, Responsable Communications Marketing du Groupe Roquette, à laquelle s’ajoute la voix d’Ingredia : « les protéines végétales sont déficientes en certains acides aminés essentiels, contrairement aux protéines de lait qui contiennent tous les acides aminés essentiels, avec un indice chimique supérieur à 1 ». Si, d’un point de vue technique, les protéines végétales peuvent se substituer aux protéines animales pour certaines applications, estime Hanen Bouslimi, « ce n’est pas le cas d’un point de vue santé (risque de carence en acides aminés). C’est à ce niveau que les protéines animales possèdent un avantage sur les végétales : elles apportent les 8 acides aminées essentiels de manière équilibrée. » Walter Lopez, Chef Marché chez Limagrain Céréales Ingrédients, confirme : « il convient de faire attention à l’équilibre nutritionnel en acides aminées essentiels et limitants. Un végétalien strict sait qu’il doit mélanger protéines de légumes secs (riches en lysine) à celles des céréales (riches en méthionine). » Afin de remédier à cet inconvénient, il est important de combiner plusieurs sources végétales car l’homme n’est pas en mesure d’élaborer 2 éléments essentiels qui sont le fer et la vitamine B12 et qui sont naturellement présents dans les produits d’origine animale. « L’homme n’est pas végétarien par nature mais biologiquement omnivore. Pour les gens qui choisissent un mode de vie végétarien, ils doivent très bien combiner les protéines végétales entre elle pour quelles soit équilibrées et aussi prendre des compléments alimentaire de fer et de vitamine B12 », explique le Directeur Général d’Improve.

 

protéinesAinsi, « un régime alimentaire équilibré et varié doit faire largement appel aux protéines pouvant être issues de céréales (blé), de légumineuses (pois / fève etc.) ou de soja », explique le président du GEPV. Ceci explique donc l’importance et l’utilité de combiner diverses sources végétales pour préparer des mélanges de protéines ou des concentrés, et assurer ainsi un bon équilibre nutritionnel. Roquette propose par exemple une combinaison de protéines de pois et de blé qui permet « d’obtenir un profil d’acides aminés complet, soit une excellente biodisponibilité, à l’égal des protéines animales », expose Marie Blondel. Un équilibre que les populations avaient l’habitude de faire, sans forcément en avoir conscience, en mixant légumineuses riche en lysine et céréales riches en acides aminés soufrés. « On trouve ainsi le couscous d’Afrique du nord par exemple, le maïs et les haricots en Amérique centrale et le riz et le soja en Asie. Ces aliments montrent qu’il est tout a fait possible de combiner les végétaux pour avoir des produits sains », conclut M. Chereau.

 

Innover pour mieux répondre aux besoins

Face à une démographie croissante de la population mondiale, qui devrait atteindre 9 milliards d’individus à l’horizon 2050, les besoins en protéines de la planète auront doublé, plus particulièrement dans les pays en développement où les rations alimentaires sont déficitaires en protéines. Dans un cadre de développement durable, il est nécessaire de développer des produits innovants et soigneusement formulés, répondant aux demandes et aux besoins de la croissance de la population mondiale, que le seul secteur de l’élevage ne pourra satisfaire. Nargys ES-SETTE

 

protéinesEn effet, les protéines animales, qui représentent 70% de la consommation de protéines dans le monde, ne pourront plus assurer à elles seules ces nouveaux besoins. Face à ces évolutions, Tereos, second producteur mondial de protéine de blé, est convaincu que le développement des protéines végétales constitue une des réponses d’avenir aux nouveaux besoins nutritionnels de la population mondiale. Ainsi, comme vu dans l’article précédent, une unité pilote pour la production d’aliments à base de protéines végétales a été inaugurée récemment.

De son côté, Roquette a récemment annoncé la construction du plus grand site de production de protéines de pois à Portage la Prairie, dans le Manitoba (Canada), afin de répondre à la demande croissante de protéines végétales pour les marchés de l’alimentation, de la nutrition et de la santé.

 

Tour d’horizon des dernières nouveautés

Reconnue pour sa capacité d’innovation et de développement de produits répondant toujours plus aux besoins des industriels, Ingredia propose aujourd’hui une protéine hautement fonctionnelle particulièrement adaptée aux produits frais hyper protéinés (yaourts et fromages frais). Cette protéine, PROMILK® 600A, apporte une texture onctueuse et crémeuse et peut remplacer une partie de la matière grasse sans aucun compromis sur les qualités organoleptiques du produit fini », explique l’équipe Marketing Ingredia. Par ailleurs, Ingredia accompagne la croissance du marché de la fromagerie grâce à des protéines uniques à profils optimisés couplées à une technologie innovante (sans séparation de sérum) pour laquelle elle détient plusieurs brevets. Cette technologie, associée aux protéines PROMILK® SH 20 ou PROMILK ® Chiz B 87, permet aux industriels de relever le défi de fabriquer plusieurs types de fromages avec le même équipement, tout en étant économique (grâce à un rendement de 100 % sans perte de sérum), et en s’adaptant aux ressources laitières disponibles en qualité et quantité. De plus, Ingredia développe son expertise sur le marché de la nutrition en réalisant des études In Vitro et In Vivo sur les caséines micellaires. « Ces études nous permettent de connaitre parfaitement les bénéfices nutritionnels de nos caséines micellaires et ainsi de proposer un portefeuille produits adapté aux marchés de la nutrition. Une des caséines micellaires innovante sur ce marché est PRODIET® Fluid. Cette protéine se retrouve dans de nombreux produits, de la nutrition sportive à la nutrition clinique », poursuit la société. Toujours dans les ingrédients laitiers, ICL Food Specialties vient de lancer une nouvelle gamme de protéines biologiques de lait et de lactosérum, sous la marque PROGANIC. « Cette ligne peut être utilisée pour enrichir en protéines des produits laitiers bio, comme des boissons sportives, des yaourts à la grecque ou des fromages frais », atteste Dr Andra Maurer, Global Lead Market Segment Dairy chez ICL Food Specialties.

 

protéineDe son côté, ADM a récemment commercialisé une nouvelle fibre de soja sous la marque SUPERB™. « Développé pour augmenter la teneur en protéines et en fibres des produits carnés, cet ingrédient contribue aussi à contrôler la rétention d’humidité et à améliorer la texture. Les applications visées sont les viandes hachées ainsi que les viandes émulsifiées et la viande sous forme de muscle entier. SUPERB™ est une fine poudre qui s’hydrate rapidement ; elle est facile à incorporer dans les systèmes d’élaboration de produits carnés. Sur le plan fonctionnel, elle participe à l’optimisation des rendements de transformation en liant l’eau, et permet de conserver des produits goûteux et juteux en améliorant la rétention et en réduisant la perte d’eau », déclare Alan Bruce, Directeur commercial international, viandes et repas.

 

Une autre tendance est la recherche de produits bons pour la santé et le bien-être. Les protéines peuvent répondre à cette demande. « Les régimes alimentaires riches en protéines de qualité élevée sont de plus en plus reconnus par le monde scientifique ; ils constitueraient une stratégie efficace pour la perte de poids et/ ou éviter de prendre ou reprendre du poids. Le soja est une source de protéines végétales maigres de haute qualité qui, selon de nombreux essais cliniques, a fait ses preuves dans la gestion du poids, ayant des effets similaires aux sources de protéines animales, lorsqu’on l’intègre à un régime ‘riche en protéines’ », expose Dr Garry Mendelson, du Service Nutrition de DuPont Nutrition and Health. Des études ont notamment suggéré que la consommation de protéines de soja contribuait à la réduction de la masse de graisse et du taux de cholestérol, luttant ainsi contre les risques cardiovasculaires. De plus, ces protéines sont quasi équivalentes aux protéines animales. « notre isolat de protéine de soja SUPRO® contient tous les acides aminés essentiels dans les proportions appropriées. Elle est également hautement et facilement digestible et peut donc être utilisée même dans des préparations pour nourrissons et dans l’alimentation entérale/clinique », affirme Dr Mendelson.

 

protéinesPour répondre à la demande des consommateurs pour des ingrédients naturels et non des additifs ultrapurifiés, Limagrain Céréales Ingrédients se positionne sur le marché des protéines uniquement avec des produits naturellement riches en protéines et sans concentration ni purification utilisant des solvants : « nous proposons des germes de blé stabilisés (28% de protéines), Nutricorn, germes de maïs stabilisés (20% de protéines) et des farines stabilisées et desamérisées de légumes secs : fève (30% de protéines !), haricot rouge, lentille verte et pois chiche », détaille Walter Lopez, Chef Marché chez Limagrain Céréales Ingrédients. « Dotées de véritables propriétés nutritionnelles, les farines de légumineuses sont idéales pour apporter notamment des protéines en toute naturalité. De plus, nos farines fonctionnelles de légumes secs améliorent l’hydratation et le moelleux des produits de panification tout en l’enrichissant nutritionnellement », poursuit-il.

 

Enfin, sur le marché de la protéine de pois, Roquette a complété sa gamme NUTRALYS® avec des produits adaptés aux spécificités de chaque application. Citons par exemple la protéine de pois NUTRALYS® XF : « cet ingrédient présente un profil nutritionnel optimisé et offre une texture lisse dans la formulation de boissons, shakes ou gels pour la nutrition spécialisée (nutrition clinique, nutrition du sportif et gestion du poids) », indique Anne-Sophie Vercruysse, Market Manager Europe chez Roquette. Autre exemple avec NUTRALYS® BF, particulièrement adaptée aux applications boulangères, à leurs exigences technologiques et à leur besoin en haute teneur en protéines, ou encore la protéine texturée de pois NUTRALYS® T65M, qui répond aux besoins du marché des substituts de viande pour les végétariens et les végétaliens grâce à son goût neutre et à sa texture fibreuse. « C’est une bonne alternative aux concentrés de protéines texturées à base de soja ou de gluten », renchérit Mme Vercruysse.

 

Type de protéines Entreprise Spécificités
Protéines de céréales et de légumineuse Tereos Produit fini ayant l’apparence de la viande de poulet
Protéine texturée de pois Roquette Goût neutre et texture fibreuse pour les substituts de viande
Protéines laitières aux profils optimisés Ingredia Fabrication économique de fromages (sans séparation de sérum)
Protéines biologiques de lait et de lactosérum ICL Food Formulation de produits bio à haute teneur en protéines
Nouvelle fibre de soja ADM Teneur en protéines et en fibres importante pour produits carnés
Isolat de protéines de soja Dupont Nutrition and Health Contient tous les acides aminés essentiels. Hautement digestible, peut convenir aux nourrissons
Farine de légumineuses Limagrin Céréales Ingrédients Apport naturel en protéines

 

Contraintes de formulation

Les contraintes de formulation et/ ou de process dépendent de l’application/ produit fini visé(e). Hanen Bouslimi, Ingénieur Commercial de Comaner, nous explique qu’il faut respecter, lors de l’incorporation de protéines dans les recettes, des paramètres tels que le temps et la température d’hydratation. « En effet, l’état d’hydratation des protéines a une influence directe sur les propriétés rhéologiques, texturales (formation de grumeaux), physiques, ainsi que la microstructure des gels laitiers », précise-t-elle. « De façon générale les paramètres à surveiller sont : la texture (par rapport à la teneur en protéines visée : plus le taux de protéines est élevé, plus la texture est compacte car les protéines ont tendance à absorber l’eau), le traitement thermique (pour éviter la dégradation protéines ou la réaction de Maillard), le pH, le goût (variant selon le taux et la source de protéine), et enfin la solubilité, la viscosité et la granulométrie (pour éviter le sableux en bouche) des protéines utilisées », explique Marie Blondel, Responsable communications et marketing Europe, Food & Foundation products, Groupe Roquette. Un mix de différentes sources de protéines peut permettre de formuler des produits à la fois riches en protéines et aux propriétés organoleptiques (goût, texture…) remarquables. Pour sa part, l’équipe Marketing Ingredia explique que « pour maximiser le potentiel de la protéine, tant en terme nutritionnel que fonctionnel, celle-ci doit être bien réhydratée en début de procédé. En fromagerie, nos protéines peuvent être la seule source protéique de la formule, en particulier dans les technologies « sans séparation de sérum » ou de fonte. Le pourcentage de la protéine dans la formule peut varier de 5 à plus de 20% selon le type de produit fini, le taux de protéine et la texture recherchés. A haute dose, les protéines n’entrainent pas de difficultés de viscosité en procédé « fondus ». En technologie sans séparation de sérum, nos nouvelles protéines spécifiques permettent de diminuer drastiquement les risques de viscosité, particulièrement problématiques lors du moulage, difficultés souvent rencontrées avec des protéines de lait standards. » La teneur en protéines est également à prendre en compte. « Le pourcentage d’incorporation de nos protéines dans les yaourts est adapté au taux de protéines recherché dans le produit fini. Selon le type de protéines et leur concentration, nos ingrédients peuvent être utilisés de 0.3 à près de 15% dans une formule de yaourt. Au-delà, le lissage pourrait ne plus être suffisamment cisaillant pour apporter une texture adaptée au yaourt recherché », poursuit-on chez Ingredia.

 

Selon ce fournisseur, lors du développement de boissons nutritionnelles traitées thermiquement, il est important de définir plusieurs paramètres afin d’identifier la protéine correspondant au mieux au cahier des charges. En effet, le pH et la teneur en protéines peuvent avoir des conséquences sur la qualité du produit fini. Une teneur très élevée en protéines peut entrainer une coagulation et une précipitation. Les caséines micellaires sont particulièrement adaptées pour le développement de boissons jusqu’à 8% de protéines. Dans le cadre des boissons à pH acide, il est important de choisir la protéine adaptée (protéine de lactosérum) ou de protéger la caséine micellaire (grâce à des pectines…).

 

Attention au goût et à la texture !

Dr. Andrea Maurer récapitule l’impact que peut avoir l’ajout de protéines à un produit donné :

  • 1. Traitement : les produits liquides avec beaucoup de protéines deviennent généralement plus visqueux.
  • 2. Goût : un grand nombre de solutions à base de protéines donnent un goût distinct qui pourrait interférer avec le goût désiré du produit final. Très peu de solutions sont capables d’enrichir des boissons de fruits clairs, sans ajouter un parfum notable (par exemple de lactosérum).
  • 3. Apparence : des solutions de protéines ayant une couleur laiteuse peuvent obscurcir les boissons claires, ce qui les rend moins attrayantes.

 

Pour Alan Bruce, plusieurs éléments sont effectivement à prendre en compte pour la formulation de produits enrichis en protéines, selon l’application visée. Par exemple, le goût et la sensation en bouche des boissons sportifs sont des caractéristiques essentielles pour séduire les consommateurs. Toutefois, en raison de la structure moléculaire ramifiée des acides aminés des protéines, il est souvent difficile de créer une boisson douce au goût. Chaque protéine apporte son profil gustatif et sa texture spécifiques. « C’est la raison pour laquelle nous avons choisi une approche holistique du développement d’un produit, qui nous permet de proposer la bonne combinaison en termes de protéines, d’arômes, de modificateurs de goût, d’agents de masquage, etc., afin d’obtenir l’expérience de dégustation la plus agréable pour le consommateur », expose M. Bruce. De la même manière, il convient de prendre un certain nombre de facteurs en compte si l’objectif est d’ajouter des protéines d’origine végétale à la viande. Pour les développeurs qui élaborent des plats préparés, l’absorption d’eau, sa rétention et son élimination sont trois aspects importants. Ils doivent également chercher à conserver une texture qui ressemble à celle de la viande, une saveur agréable et la palette de couleurs adéquate pour assurer l’acceptation du produit par le consommateur.

 

Source : Focus protéines

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