Les produits « veggie » sont devenus les incontournables de l’innovation alimentaire. Pas une semaine ne passe sans lancement d’un substitut de viande, d’un dessert sans lait ou d’un jus végétal. Bien des industriels ont déjà tenté d’investir le créneau, mais force est de constater que les produits ne sont pas aussi satisfaisants qu’on pourrait l’attendre. Rares sont les lancements capables de répondre à toutes les contraintes édictées par ces néo-consommateurs.
Prix : trop cher pour faire la différence
Côté budget, on vante souvent le végétal pour son prix inférieur à la viande. Ce qui est peut-être vrai pour les produits bruts mais pas pour les aliments transformés. Sur les plats cuisinés traiteur, on compte souvent un euro de plus qu’une recette classique. Au rayon frais, le steak haché de bœuf (par deux) démarre à 9 € le kilo quand son analogue oscille entre 11,85 et 17,50 €/kg. Un différentiel de prix qui pourraient pousser les flexitariens à préférer une bonne viande du boucher.
La praticité, parfaitement maîtrisée
Les flexitariens sont présents dans toutes les catégories de population mais la plupart sont des urbains ou des familles. La praticité et la facilité d’usage restent donc primordiales. Raison pour laquelle on trouve les mêmes codes dans les analogues, et souvent au même rayon que les références classiques. Les néoconsommateurs veulent aussi être rassurés, surtout quand ils ne savent pas comment intégrer plus de produits végétaux. De ce point de vue, les produits mis sur le marché répondent bien à la demande : ils sont faciles à utiliser, ont des durées de vie suffisamment longues et sont conditionnés dans des emballages aussi pratiques que les autres.
Des efforts à faire en nutrition
Intolérance au lactose, peur d’un risque de cancer potentiel ou de résidus d’antibiotiques avec les charcuteries, les peurs, souvent irrationnelles, s’accumulent pour repousser les produits animaux. Cependant le végétal n’apporte pas de solution miracle : faut-il rappeler que le soja est allergène, que les céréales ou légumineuses peuvent être cultivées avec des pesticides et que le profil nutritionnel des analogues n’est pas toujours aussi intéressant que l’original. Néanmoins, des analogues de viandes ou de nuggets ont des teneurs similaires en protéines et en lipides que leurs équivalents carnés. Certains font même des efforts sur les teneurs en fibres.
Pas la solution écologiquement parfaite
Autre grand levier, les produits végétaux sont notamment plébiscités car « c’est mieux pour la planète ». Les consommateurs citent les économies d’eau, d’énergies, de gaz à effet de serre et de surfaces agricoles pour cultiver les céréales, légumes et légumineuses par rapport aux bovins. Argument tout à fait valable mais qui ne doit pas faire oublier que certains végétaux sont moins vertueux que d’autres sur ces mêmes critères. Les amandiers sont parfois lourdement irrigués aux États-Unis. Importer des céréales ou des matières premières de pays lointains n’est pas anodin en termes de développement durable.
Une liste d’ingrédients parfois criticable
Comme tous les autres consommateurs, les flexitariens veulent du naturel, à savoir pas d’additif, pas d’aliments ultra-transformés ni d’ingrédients indésirables. Mais en pratique, les substituts incluent des protéines texturées, des stabilisants, des arômes, des colorants et en général une liste d’ingrédients plus longue que le produit original. Épaississants, fibres et autres méthylcelluloses ne conférent pas l’image de clean label que les consommateurs attendent.
Un goût pas toujours à la hauteur
Si on s’attend à quelque chose proche de la viande ou des produits laitiers, la plupart des analogues déçoivent. Pois, soja et autres légumineuses apportent encore des notes indésirables, pas toujours simples à camoufler. Masquer le tout avec des épices n’est pas toujours payant car cela s’avère segmentant. Un consommateur déçu deux ou trois fois risque de s’éloigner de la catégorie pour retrouver le plaisir d’un steak ou d’un yaourt.
Ne pas jouer les copies conformes
Toutes attentes sont-elles incompatibles ? Pas forcément. Elles paraissent paradoxales mais ce n’est peut-être qu’à cause de préjugés. Il n’est par exemple pas évident que les consommateurs veulent absolument des copies conformes d’un produit carné ou laitier. Néanmoins, on peut voir ces « copies » comme un moyen de transition vers des produits de seconde génération, avec des formes plus simples. Le végétal peut être remis à l’honneur autrement, dans des plats avec une image moins transformée, comme les produits de la marque Hari&Co. Elle a mis au point des galettes et des boulettes qui ont un atout majeur : elles sont savoureuses. A bien y réfléchir, ces aliments moins transformés seraient potentiellement plus faciles à formuler, moins chers, mieux classés au Nutri-Score et moins gourmands en ressources grâce à des matières premières françaises. Si le pari du goût est gagné, on peut espérer que ce type de produits va s’installer dans la durée.